Actualités Leçons tirées du 4ᵉ webinaire de la Plateforme Agri-PDB sur l’agroécologie
Agroécologie

Leçons tirées du 4ᵉ webinaire de la Plateforme Agri-PDB sur l’agroécologie

La Plateforme Agri-PDB a organisé avec succès le 4ᵉ webinaire sur l’agroécologie, réunissant des représentants institutionnels et des agriculteurs marocains afin de discuter des mécanismes financiers destinés à accélérer la transition agroécologique.

4e Webinaire de la plateforme Agri-PDB sur l’agroécologie

Financer la transition agroécologique : voix des agriculteurs et perspectives des banques publiques de développement 

27 novembre 2025  | Rome, Italie

Introduction 

Tenu en ligne le 27 novembre 2025 et organisé par la plateforme Agri-PDB, le 4ème webinaire sur l’agroécologie a réuni des représentants institutionnels et des agriculteurs marocains afin de discuter des leviers financiers pour accélérer la transition agroécologique. 

Mise en contexte 

La session a été ouverte par des représentants de la Commission européenne (DG INTPA), de la Coalition pour l’agroécologie et du FIDA. Marion Michaud (Commission européenne) a rappelé que l’agroécologie, fondée sur les principes définis par la FAO, constitue aujourd’hui une réponse crédible, efficace et scientifiquement étayée face aux défis globaux tels que le changement climatique, la dégradation des sols et la perte de biodiversité. Olivier Oliveros (Coalition pour l’agroécologie) a souligné la reconnaissance croissante de l’agroécologie dans les stratégies politiques nationales et internationales, notamment dans le cadre des Conventions de Rio. Marco Camagni (FIDA) a mis en accent le rôle central des organisations paysannes, véritable moteur d’innovation, de résilience et de transmission des connaissances locales, et a rappelé la pertinence de leur implication dans l’élaboration de mécanismes financiers adaptés. 

Malgré un intérêt croissant de la part des décideurs politiques et des partenaires de développement, les investissements publics en faveur de l’agroécologie demeurent largement insuffisants. La transition écologique nécessite des financements non seulement plus élevés, mais également conçus sur le long terme, afin de tenir compte de la période de transition (souvent entre cinq et dix ans) durant laquelle les résultats agronomiques peuvent être incertains. Dans ce cadre, le webinaire s’inscrit dans la continuité des travaux précédents de la plateforme Agri-PDB visant à rapprocher la vision institutionnelle de la réalité du terrain, en donnant cette fois la parole directement aux agriculteurs. 

Leçons du terrain – Voix des agriculteurs 

Les témoignages convergent vers une même conclusion : la transition agroécologique repose sur des choix courageux, mais elle se heurte à un accès limité aux financements adaptés. 

  • Mimoun Alhouz (Taza) a expliqué comment la diversification vers l’amandier, l’apiculture et les plantes aromatiques, soutenue par Fert Maroc, constitue une stratégie résiliente face à la sécheresse. Il souligne toutefois que ce modèle ne peut être généralisé sans appui technique durable et proximité institutionnelle. 
  • Fatiha Hassouni (région de Rabat) a présenté une exploitation gérée selon des principes agroécologiques intégrés (zéro intrants externes, élevage mixte, énergie solaire, gestion de l’eau), financée uniquement par ses propres moyens. Elle a insisté sur l’absence de produits financiers adaptés aux petits producteurs innovants et sur la nécessité de mécanismes souples prenant en compte le risque de transition et les délais de rentabilité. 
  • Ramdan Imdabr (Taza), a décrit son expérience positive en matière d’adoption de pratiques agroécologiques, mais a souligné les obstacles rencontrés lors de sa demande de prêt auprès du Crédit Agricole du Maroc : les lourdeurs administratives, les exigences de garanties foncières et la rigidité du calendrier de remboursement. 
  • Mustapha Belharcha a enfin mis l’accent sur les besoins de formation, de soutien à l’installation, de structuration des marchés locaux et de développement de filières complémentaires, comme le tourisme rural. Il a plaidé pour des modèles de financement combinant investissement productif et subventions climatiques — notamment via des mécanismes de valorisation environnementale (carbone, eau) — en collaboration avec des acteurs spécialisés. 

Dialogue institutionnel – Perspective d’une BPDA 

Intervenant au nom du Crédit Agricole du Maroc, Ihssane El Baijouni a présenté un programme structuré visant à accompagner la transition verte des exploitations agricoles et agroalimentaires. Celui-ci repose sur plusieurs produits financiers complémentaires, notamment : 

  • Biofilaha, permettant de financer jusqu’à 100 % de l’investissement pour les projets d’agriculture biologique, avec un différé de remboursement pouvant aller jusqu’à six ans ; 
  • Ecotaqa (Ecotaqa Agri / Ecotaqa Agro), orienté vers l’efficacité énergétique et couvrant l’acquisition de matériel adapté, y compris des semoirs de semi-direct dans le cadre d’un partenariat avec l’OCP ; 
  • AgroNifaya, dédiée au financement des projets de traitement et de valorisation des déchets agricoles et agro-industriels. 

Ces instruments sont associés à des mesures de réduction du risque pour l’agriculteur. Elle a insisté sur le fait que la transition agroécologique est avant tout un processus progressif, qui nécessite un accompagnement technique de proximité. Le CAM renforce ainsi sa coopération avec la plateforme Agri-PDB et les partenaires européens (programme ILSA) afin de structurer des dispositifs d’appui technique et de formation à destination des institutions financières et des producteurs. 

Synthèse de l’AFD 

Claude Torre (AFD) a clôturé la session en soulignant que la transition agroécologique est porteuse de performance à long terme (5-10 ans), mais implique des risques élevés durant la phase de transition, qui doivent être pris en charge pour permettre le financement. Il a insisté sur : 

  • la nécessité d’incitations et d’outils de gestion du risque (ex. assurance, subventions) afin de lever les freins bancaires ; 
  • l’importance d’un accompagnement technique continu, au-delà des projets ponctuels, pour sécuriser la mise en œuvre ; 
  • la création de valeur ajoutée locale via diversification et filières de qualité, notamment grâce aux marchés territorialisés. 

Il a rappelé que les systèmes agroécologiques sont plus résilients face au changement climatique et peuvent devenir moins risqués pour les banques si les dispositifs d’appui sont renforcés. Il a enfin appelé à poursuivre le dialogue entre agriculteurs, banques et partenaires, pour transformer cette vision en solutions financières opérationnelles. 

Leçons pour les banques publiques de développement 

Les interventions mettent en lumière trois priorités majeures : 

  1. Associer systématiquement financement et accompagnement technique, condition essentielle pour sécuriser la transition et limiter le risque de crédit. 
  2. Adapter les produits financiers aux profils des petits agriculteurs, notamment en simplifiant les procédures, en assouplissant les exigences de garanties et en tenant compte de la durée de transition agroécologique. 
  3. Renforcer la collaboration entre agriculteurs, institutions financières et partenaires publics, afin de co-construire des mécanismes financiers adaptés aux réalités du terrain et intégrant la valeur environnementale et sociale des pratiques. 

Conclusion 

En conclusion, le webinaire a réaffirmé que l’agroécologie ne doit pas être perçue comme une obligation, mais comme une évolution progressive, nécessitant des financements flexibles, un accompagnement technique solide et une coopération renforcée entre producteurs, banques et partenaires publics. Un nouveau dialogue entre les agriculteurs et les institutions financières sera organisé au premier semestre 2026 pour approfondir ces pistes de collaboration. 

 

Cliquez ici pour accéder à l’enregistrement du webinaire.